Pisco Sour : querelle enfantine entre le Pérou et le Chili ?

Pisco Sour : querelle enfantine entre le Pérou et le Chili ?
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Après la découverte du Guacamole, nous voici de retour sur le territoire sud-américain pour y découvrir les origines de notre nouvelle recette : le Pisco Sour !

Cocktail rafraîchissant à base de Pisco, de citron vert et de blanc d’œuf, le Pisco Sour se déguste de multiples façons ! Que vous soyez détendu·e·s, en soirée au bord des plages Chiliennes ; ou perdu·e·s dans un petit bar péruvien niché au cœur d’une montagne, vous serez séduit·e·s par la douceur de ce breuvage.


Mais si les bonnes ondes qui accompagnent la dégustation de ce cocktail sont universelles, l’origine du Pisco, élément principal de cette boisson, est pourtant un véritable sujet de discordes entre les peuples chiliens et péruviens. Les deux pays revendiquent effectivement sa création, son appellation, mais également la manière dont il est fabriqué.

Pour comprendre l’origine du Pisco Sour, plongez dans l’Histoire d’un alcool qui divise deux populations, sur fond de Conquistadors espagnols et d’anecdotes surprenantes.

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Les origines du Pisco

Le vin, à l’origine du Pisco ?

Si le Pisco est un spiritueux savouré généralement entre 35° et 45°, il semblerait pourtant qu’il doive son apparition à un alcool beaucoup plus léger et très apprécié des français, le vin.


En effet, c’est au milieu du XVIème siècle que les conquistadors espagnols importent, dans toute l’Amérique latine, la viticulture. Très rapidement, les populations déjà présentes se mettent donc à produire leur propre vin, qui s’avère être de très bonne qualité.

Une qualité telle, d’ailleurs, que les espagnols eux-mêmes finissent par importer le vin péruvien au sein de leurs terres. Une situation inacceptable pour le roi d’Espagne Felipe II, qui fait alors interdire la production de vin en Amérique latine.

L’occasion pour les sud-Américains de tester de nouvelles manières de vinification, de distillation, de réduction et de vieillissement du raisin, jusqu’à ce que soit finalement créée une eau-de-vie à base de raisin qui prendra le nom de Pisco quelques décennies plus tard.

L’origine de l’appellation

Deux hypothèses sont avancées pour expliquer le nom de « Pisco ». La première est la plus simple. Le Pisco tirerait son nom du port d’où il est exporté, depuis plusieurs siècles. Un port situé à près de 300km au sud de Lima, et qui tire lui même son nom des petits oiseaux appelés « Pisscu », qui survolent et abondent la vallée.

Une seconde hypothèse existe également, plus légendaire mais tout aussi probable. Il y a plus de 2 000 ans, la population des Paracas vivaient dans l’actuelle région de la vallée de Pisco. Une population à la grande renommée, particulièrement due à la céramique qu’ils produisaient. Et les potiers, qui travaillaient cette céramique, étaient eux même nommés « piskos ».

Utilisées dès lors pour transporter tout type de liquides et de boissons, les poteries prennent à leur tour le nom de piskos. Ainsi, on se met à transporter l’eau-de-vie de raisin dans ces jarres, qui finissent par être imprégnées de son odeur. Alors, par raccourcis, l’alcool transporté fini par être nommé « piskos », devenant ensuite Pisco.


Chili ou Pérou, la guerre du Pisco

Le premier élément important à noter pour mieux comprendre le conflit entourant la « paternité » du Pisco, est de savoir que les deux pays ont proclamé le Pisco Sour comme leur boisson nationale. Et évidement, cette rivalité ne s’arrête pas uniquement à une guerre de fierté culturelle, c’est également une vraie bataille économique.

Explications des différents entre le Chili et le Pérou concernant les origines du Pisco.

Une opposition historique

Le premier point sur lequel le Pérou et le Chili n’arrivent pas à s’accorder concerne l’ancienneté du Pisco. Pour eux, celui des deux qui a commencé la production de cet alcool pourra s’en revendiquer comme unique fournisseur.

Alors, la chasse aux informations historiques fait rage. Et dans cette chasse commune, le Chili semble avoir pris un léger avantage, plutôt inattendu. En effet, de récentes découvertes d’archives du XVIIIème siècle attribueraient au Chili la « paternité » du Pisco.

C’est l’Argentin Pablo Lacoste qui, en fouillant dans les archives nationale chilienne, aurait trouvé un texte décisif datant de 1733. L’écrit confirmerait de manière irréfutable que la première utilisation du terme « Pisco » serait à mettre au

En réponse à cela, les Péruviens opposent à leur tour un document issu de leur propres archives nationale. Un nouveau testament, daté de 1613, sur lequel est mentionnée « l’aguardiente de Pisco », l’eau de vie de Pisco.

Seul problème, Pisco est la région dans laquelle est produite l’eau de vie, et rien ne prouve qu’il s’agisse ici du nom spécifique donné à cet alcool.


Un conflit économique

Mais au delà de cette bataille historico-nationaliste, c’est avant tout un conflit économique qui opposent les deux pays dans cette guerre du Pisco. Et concernant la production ou la consommation de cette boisson, les Chiliens sont loin devant les Péruviens.

En effet, le Chili produit chaque année plus de 36 millions de litres de Pisco, là ou le Pérou n’en produit que 9 millions. Même constat pour la consommation, puisque le Pérou ne consomme que 0,22 litre de Pisco par an, soit… 10 fois moins que son voisin chilien !

Seulement à l’international, les choses se compliquent pour le Pisco chilien, et la concurrence est rude. Par exemple, sur le continent sud-américain, l’intégralité des pays importent uniquement du Pisco péruvien. Aux États-Unis et dans l’Union Européenne, la situation porte à confusion. Si le Pisco chilien et péruvien sont autorisés, seule Pisco (la vallée du Pérou) est reconnue comme indicateur d’origine géographique.

Une bataille… anecdotique ?

Nous l’aurons donc compris, la guerre entre le Chili et le Pérou concernant le Pisco n’est pas prête de cesser. Pire, le conflit semble devenir une querelle bi-nationnale et prend de l’ampleur.

Christian Pino, présentateur télévisé chilien, en a d’ailleurs fait les frais. Au cours d’une interview réalisé auprès d’un producteur péruvien de Pisco, le journaliste a évoqué en direct à la télévision, le « Pisco Peruano », le pisco péruvien. Un terme absolument proscrit au Chili, qui ne reconnait comme Pisco que celui produit sur son territoire.

Une erreur qui aura valu a Christian Pino d’être licencié dès le lendemain par son employeur, subissant les pressions de l’association des producteurs de pisco chilien. Le journaliste est alors accusé d’« avoir trahi sa mission d’information du peuple chilien ».

Mais si le Chili ne reconnait en rien le « Pisco péruvien », et que ce terme semble même être un blasphème, le pays en est pourtant… le plus gros importateur au monde ! Même si, évidement, il est revendu sous une autre appellation.

Le Pisco Sour

Après l’évocation de toutes ces tensions et rivalités, un verre de Pisco Sour serait le bienvenu. Raffraîchissant, citronné, il est l’un des cocktails symbolisant le soleil, les vacances, la détente…

Mais évidemment encore une fois, le Chili et le Pérou se disputent l’antériorité de la recette.

La naissance du cocktail

Pour les Péruviens, la première recette du cocktail serait daté des années 1920. Un barman américain nommé Victor Vaughen Morris se serait donc installé à Lima, au Pérou, où il aurait soumis une première recette, mélangeant l’alcool local, le Pisco, avec du citron et du sirop de sucre. Quelques mois plus tard, après le service, l’un de ses collègues aurait alors ajouté du blanc d’œuf pour la mousse, et de l’angostura pour la couleur.

Pour les Chiliens, c’est Eliott Stubb, un marin anglais travaillant sur un navire nommé Sunshine, qui aurait inventé ce cocktail avec les élément présent sur le bateau, qui longeait les côtes chiliennes. Ainsi, les marins chiliens présents à bord auraient ensuite apporté la recette sur le territoire.

Le Chili est d’ailleurs le premier pays à avoir commercialisé du Pisco Sour directement fourni en bouteille et distribué à grande échelle, et soumis à plusieurs règlementation. La première étant, évidement, d’être concoté avec du Pisco chilien.

Notre recette Canadienne du Pisco Sour

Pour cette recette, difficile de trancher entre le Pisco chilien et le Pisco péruvien… Alors nous avons fait le courageux choix… de ne pas trancher ! Afin que personne ne soit laissé pour compte, nous avons donc concocté deux recettes semblables en tout point. L’une sera réalisée avec du Pisco péruvien, l’autre avec du Pisco chilien.

Pour rendre le tout plus original, nous ajoutons un élément surprise… Venu lui aussi du continent américain, nous utilisons la douceur du sirop d’érable pour remplacer le sirop de sucre utilisé habituellement.

Les ingrédients
  • 5 cl de Pisco (Péruvien ou Chilien)
  • 3 cl de citron vert
  • 2 cl de sirop d’érable
  • 1 blanc d’œuf
  • Quelques gouttes d’angostura amer
Les étapes
  • Monter le blanc d’œuf en neige
  • Verser dans un shaker
  • Ajouter le Pisco, le jus de citron vert, le sirop d’érable
  • Bien mélanger le tout
  • Ajouter un peu de glace pilée puis mélanger à nouveau
  • Verser dans des verres individuels
  • Ajouter quelques gouttes d’angostura amer sur la mousse
  • Déguster bien frais
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